Nouvel épisode tendu entre Telegram et les autorités françaises. Pavel Durov, fondateur de la messagerie chiffrée, affirme que la France a tenté d’imposer une porte dérobée dans l’application pour permettre à la police d’accéder aux messages privés. Une demande jugée « techniquement impossible à sécuriser » et qui pourrait pousser Telegram à se retirer complètement du marché français. Durov dénonce une atteinte directe à la vie privée des citoyens et alerte sur une dérive sécuritaire de plus en plus présente, en France comme en Europe.
Le retour d’une loi controversée
Tout est parti d’un article glissé dans une proposition de loi censée lutter contre le narcotrafic. Son nom ? L’article 8ter. Derrière ce nom un peu obscur se cachait une mesure explosive : obliger les applications de messagerie chiffrée comme Telegram à intégrer une porte dérobée, pour permettre aux forces de l’ordre d’accéder aux messages privés.
Sans surprise, cette idée a fait grincer des dents. Défenseurs de la vie privée, associations et même certains parlementaires ont rapidement tiré la sonnette d’alarme. Malgré son adoption au Sénat, l’article 8ter a finalement été retiré par la commission des lois de l’Assemblée nationale. Fin de l’histoire ? Pas vraiment.
Il y a quelques jours, le préfet de police de Paris a ravivé la flamme. Dans une interview, il a réaffirmé la nécessité d’accéder aux conversations chiffrées sur Telegram, présenté comme un outil privilégié par les trafiquants. Une déclaration qui n’a pas tardé à faire réagir Pavel Durov, qui y voit une tentative déguisée de relancer une loi déjà rejetée.
La position sans concession de Durov
Pavel Durov n’a pas mâché ses mots. Dans un message publié sur son canal Telegram, il rappelle que son application ne transigera jamais avec le chiffrement. Pour lui, il est tout simplement hors de question d’affaiblir la sécurité des communications, même si cela signifie se retirer du marché français.
« Telegram préfère quitter un pays que d’introduire une backdoor qui mettrait en péril la vie privée de ses utilisateurs. »
Il insiste aussi sur un point crucial : dans ses 12 ans d’existence, Telegram n’a jamais transmis le moindre contenu de message privé, à aucun gouvernement. Et ce n’est pas une posture marketing. À ce jour, les seules informations que Telegram accepte de fournir – et uniquement avec une décision de justice – sont les adresses IP et numéros de téléphone de suspects. Rien de plus.
Un positionnement clair, assumé et qui tranche avec la politique de certaines autres plateformes plus enclines à coopérer pour éviter les conflits.
Une backdoor, un danger pour tous
Pavel Durov le martèle depuis des années : une porte dérobée, même pensée pour un usage strictement policier, reste une faille. Et une faille, par définition, peut être exploitée. Pas seulement par les forces de l’ordre, mais aussi par des hackers, des cybercriminels ou même des services de renseignement étrangers.
« Il est techniquement impossible de garantir qu’une backdoor ne sera utilisée que par la police », affirme-t-il.
Et ce n’est pas de la paranoïa : les exemples de fuites ou d’exploitations imprévues se comptent par dizaines dans l’histoire des failles de sécurité. Durov alerte donc sur un risque systémique : celui de voir la vie privée de tous les utilisateurs compromise, y compris celle des personnes totalement respectueuses de la loi.
Cerise sur le gâteau, cette mesure serait inefficace selon lui. Les criminels n’auraient aucun mal à se rabattre sur d’autres applications moins connues ou à utiliser des VPN pour masquer leurs traces. Autrement dit, on perd la sécurité des honnêtes gens sans pour autant coincer les vrais délinquants.
Conclusion : Telegram ne pliera pas
Face aux pressions des autorités françaises et européennes, Pavel Durov reste fidèle à sa ligne : pas question d’ouvrir une brèche dans le chiffrement de Telegram. Pour lui, céder sur ce point reviendrait à sacrifier la confidentialité de millions d’utilisateurs et à ouvrir la porte à tous les abus.
La tentative de loi française a été stoppée, mais l’affaire est loin d’être terminée. Entre discours sécuritaires et préoccupations légitimes sur la vie privée, le débat ne fait que commencer. Et Telegram, en refusant catégoriquement toute forme de porte dérobée, se positionne comme un bastion de résistance. Quitte à claquer la porte si le respect des droits fondamentaux n’est plus garanti.
Ça va finir par arriver…